Introduction : l’organisation d’une école d’ostéopathie
Les établissements dispensant la formation en ostéopathie sont soumis à une double tutelle :
- Ministère de la Santé, via la DGOS (Direction générale de l’offre de soins) et les ARS, qui délivrent et contrôlent l’agrément.
- Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, garant de la qualité pédagogique et du respect des standards de l’enseignement supérieur privé.
Pour fonctionner correctement, une école d’ostéopathie doit disposer d’un certain nombre d’organes de fonctionnement (Décret n° 2014-1043) :
- Le directeur d’établissement : « L’établissement est dirigé par un directeur qui justifie du titre d’ostéopathe, est titulaire d’un titre universitaire de niveau I en management ou dispose d’une expérience d’au moins cinq ans en management. »
- Le conseil scientifique : « Supervise le dispositif et les contenus pédagogiques de l’établissement ; il garantit la qualité scientifique de la formation. Il comprend au moins un médecin, un titulaire de l’usage professionnel du titre d’ostéopathe et un enseignant-chercheur en lien avec une des matières enseignées. »
- Le conseil pédagogique : « Compétent sur toutes les questions relatives au dispositif de formation et à la vie étudiante. Il est consulté sur le projet pédagogique, le règlement intérieur, l’effectif des différentes catégories de personnel, l’utilisation des locaux et du matériel pédagogique, le rapport annuel d’activité pédagogique et les situations individuelles des étudiants.
Il comprend au moins un représentant des enseignants, un représentant des tuteurs de stage, un représentant des étudiants et un représentant de l’Agence régionale de santé. » - La commission de validation des unités de formation et des compétences professionnelles : « Présidée par le directeur de l’établissement, elle comprend les coordinateurs pédagogiques, au moins un enseignant des matières fondamentales, un enseignant des domaines de pratiques cliniques et l’enseignant-chercheur siégeant au conseil scientifique de l’établissement. »
Pour pouvoir délivrer le titre d’ostéopathe à l’issue de la formation diplômante, une école doit obtenir un agrément du ministère de la Santé.
Cet agrément est délivré pour une durée de 5 ans, renouvelable.
Cependant, il peut être retiré sur décision du ministre chargé de la Santé en cas de manquement constaté, d’incapacité ou de faute grave des dirigeants de l’établissement.
1. Critères d’agrément d’une école
Le décret n° 2014-1043 du 12 septembre 2014 définit les conditions d’agrément des écoles, valables 5 ans. Il prévoit notamment :
a) Des infrastructures adaptées
Locaux exclusivement dédiés à la formation et conformes aux normes PMR.
Superficie accessible aux étudiants proportionnelle au nombre d’inscrits (5 m² par étudiant).
Clinique interne recevant des patients et délivrant des soins ostéopathiques dans le cadre de la formation pratique, sous la responsabilité d’un enseignant ostéopathe.
Taille des locaux adaptée au public et à l’activité nécessaire pour que chaque étudiant effectue les deux tiers de sa formation clinique sur des consultations réelles.
b) Une équipe pédagogique qualifiée
Au moins 50 % de formateurs et coordinateurs permanents habilités à user du titre d’ostéopathe.
Un formateur à temps plein pour 25 étudiants.
Les qualifications requises pour les formateurs sont:
- Diplôme ou autorisation d’usage du titre d’ostéopathe avec 5 ans minimum d’expérience ;
- Titre universitaire de niveau I dans les domaines de la pédagogie, de la santé, des sciences ou de la matière enseignée ;
- Diplômes mentionnés aux titres Ier à VII du livre III de la quatrième partie du Code de la santé publique.
Un coordinateur pédagogique par promotion (soit 5 coordinateurs pour un cycle complet).
Une équipe administrative adaptée : au moins un ETP pour 100 étudiants.
c) Une formation clinique intensive et un suivi renforcé
Au moins 2/3 de la formation clinique au sein de la clinique interne de l’établissement.
Reste du temps : stages extérieurs auprès de maîtres de stage agréés.
Minimum 150 consultations complètes et validées par étudiant.
Évaluation annuelle : rapport d’activité, bilans pédagogiques, enquêtes de satisfaction, audits internes et externes.
Enquêtes d’insertion professionnelle à 18 et 30 mois après le diplôme.
d) Un nombre d’étudiants limité par la capacité d’accueil
Critères : superficie des locaux, capacité clinique, accueil des patients, moyens techniques et pédagogiques, effectifs pédagogiques et administratifs.
2. Fonctionnement décisionnel du ministère
La Commission Consultative Nationale d’Agrément (CCNA), instituée par le décret de février 2018, propose au ministre d’accepter, renouveler ou refuser un agrément.
Composition : 16 membres dont
- IGAS (président), DGOS (vice-président), DGESIP, DGCRF, recteur d’académie, ARS, ostéopathes exclusifs, ostéopathes médecins, ostéopathes masseurs-kinésithérapeutes.
Pouvoirs du ministre :
- Décision souveraine, possibilité de retrait ou de limitation de capacité.
- Depuis le décret du 1er octobre 2021 : possibilité d’agrément provisoire avec mise en conformité obligatoire.
- Contrôles réguliers par les ARS et l’IGAS.
3. Contenu de la formation
Selon le décret n° 2014-1505 et ses arrêtés :
- Durée : 4 860 heures sur 5 ans
- 7 grands domaines d’enseignement : théorie, pratique, stages supervisés.
- Minimum 150 consultations complètes à partir de la 3ᵉ année.
- Progression : observation → apprentissage progressif → consultations complètes encadrées.
Années | Année 1 | Année 2 | Année 3 | Année 4 | Année 5 | TOTAL |
Cours magistraux (CM) | 448 h | 416 h | 324 h | 274 h | 84 h | 1546 h |
Travaux dirigés incluant les travaux pratiques (TD) | 454 h | 510h | 436 h | 252 h | 162 h | 1814 h |
Total CM + TD | 902 h | 926 h | 760 h | 526 h | 246 h | 3360 h |
Formation pratique clinique | 50 h | 70 h | 210 h | 450 h | 720 h | 1500 h |
Total CM + TD + formation pratique clinique | 952 h | 996 h | 970 h | 976 h | 966 h | 4860 h |
Conditions pour le maître de stage :
- Titre d’ostéopathe
- Minimum 5 ans d’exercice
- Formation minimale sur le projet pédagogique et les objectifs de stage.
Obtention du diplôme :
- Validation de toutes les compétences du référentiel
- Mémoire de fin d’études
- Évaluation des pratiques cliniques.
4. Dispenses de formation
L’arrêté du 12 décembre 2014 prévoit des dispenses pour :
- Médecins, sages-femmes, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues, infirmiers, étudiants ayant validé une première année scientifique en biologie ou médecine.
- Chiropracteurs (dispenses spécifiques).
- Autres cas : sur décision du directeur d’établissement après avis du conseil pédagogique.
UN RAPPORT IGAS EN 2021 POUR AMELIORER LA FORMATION
Le 26 octobre 2021, le ministre des Solidarités et de la Santé a confié à l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) la mission d’évaluer le dispositif d’agrément des établissements de formation en ostéopathie.
Organisme interministériel, l’IGAS est chargé de conduire des missions de contrôle, d’audit, d’expertise et d’évaluation. Elle conseille les pouvoirs publics et participe à l’élaboration comme à la mise en œuvre des réformes.
Dans son rapport publié en avril 2022, l’IGAS dresse un état des lieux de la situation de l’ostéopathie en France en 2021.
La France connaît une croissance exceptionnelle du nombre d’ostéopathes, la plus élevée au monde, malgré l’absence de reconnaissance comme profession de santé. Depuis la loi Kouchner de 2002, seuls les diplômés d’écoles privées agréées par le ministère de la Santé (ou titulaires de diplômes universitaires pour médecins) peuvent porter le titre. L’agrément, délivré pour 5 ans après avis de la CCNA, s’accompagne toutefois d’une formation à la qualité inégale, que la CCNA peine à contrôler efficacement.
Le rapport recommande :
- Renforcer la procédure d’agrément et faire évoluer le dispositif de formation et de validation du diplôme.
- Réviser la CCNA (composition, calendrier, formation des membres, outils, standardisation).
- Encourager une certification indépendante des écoles selon des critères communs.
- Limiter le nombre d’étudiants formés afin de freiner la croissance démographique et améliorer l’insertion professionnelle.
- Compléter les dispositions du Code de la santé publique afin d’y intégrer les ostéopathes au titre de Profession de Santé ;
- Transférer la responsabilité de l’agrément du ministère de la Santé vers une structure dédiée, inspirée du modèle anglais ; GOSC, à l’instar d’une API ou une AAI en France.
- Faire évoluer l’examen final pour mettre en place une validation externe de l’examen final afin de sécuriser la qualité du diplôme ;
- Instaurer une obligation de conventionnement avec l’université ;
- Systématiser les inspections des établissements de formation.
osteopathes.pro a réalisé une synthèse complète du rapport de l’IGAS, dont nous vous transmettons ci-joint les principaux éléments:
- L’IGAS fait un constat détaillé et préoccupant de l’ostéopathie
- L’IGAS formule 26 propositions pour réformer l’ostéopathie
- Rapport IGAS: bientôt une autorité et le statut de profession de santé ?
- Résultats de l’enquête auprès des ostéopathes et des étudiant·e·s sur le rapport IGAS
Pierre-Adrien LIOT